L’idée de l’existence de deux gauches est reconnue depuis longtemps : opposition entre Jules Guesde et Jean Jaurès à la fin du 19ème siècle, scission de 1920, au Congrès de Tours, entre socialistes et communistes... Elle a connu un regain de notoriété avec la rivalité entre Mitterrand et Rocard dans les années 80. Disons que, pour simplifier, en 1981, Mitterrand avait raison politiquement et Rocard économiquement, comme l’a démontré ensuite le tournant de 82-83 ; malheureusement, Mitterrand n’a jamais voulu reconnaitre ce tournant économique et son erreur ; il ne l’a donc pas expliqué aux Français. Si le débat entre «deuxième gauche» et «gauche archaïque» a alors passionné la presse, les journalistes n’ont guère abordé le fond et se sont plutôt épanchés sur la lutte entre les deux hommes. C’est la première raison de l’échec de la deuxième gauche, cette non-reconnaissance de la social-démocratie, comme si cela était honteux. Être social-démocrate ce n’est pas avoir des recettes clef-en-main, comme semble le supposer certains journalistes, c’est être convaincu que la seule façon de progresser durablement est de discuter, de faire des compromis ; et non pas des compromissions comme le crient immédiatement les partisans de la gauche archaïque.
Même si Jospin a en partie redressé la barre dans les années 90 (on a oublié que c’est le premier ministre qui a fait baisser un temps le chômage), la droite a gagné les élections suivantes et le parti socialiste a depuis accumulé les erreurs :
- Lors du référendum sur la Constitution européenne, le PS avait défini initialement sa position par une consultation interne remportée par les partisans du OUI; lorsque Laurent Fabius a fait campagne pour le NON (avec son fameux plan B… qui n’a jamais existé), François Hollande aurait dû l’exclure du parti, au moins temporairement.
- Avant la campagne interne pour la candidature à l’élection présidentielle de 2012, Martine Aubry, sûre d’être élue, n’aurait jamais dû avoir le droit de passer des accords électoraux pour les législatives ; c’est ainsi que, dès le départ, Hollande bien qu’élu Président de la République, s’est retrouvé sans réelle majorité au Parlement.
- Le même Hollande, élu en partie grâce à la position courageuse de François Bayrou, a eu le tort de ne pas faire d’ouverture au centre et de se retrouver ainsi avec une majorité qui ne représentait pas son programme.
- Après la défection d’un certain nombre de responsables politiques, s’opposant pourtant à « leur Président », le PS ne les a pas exclus.
- Le choix de Jean-Marc Ayrault, homme de valeur mais trop proche de Hollande a été une erreur ; celui de Manuel Valls, excellent (sauf bien sûr pour la gauche archaïque), a été trop tardif.
- La primaire socialiste fut ouverte à tous les candidats (y compris les traitres) et à tous les électeurs (y compris non socialistes).
On connait la suite : Hollande ne s’est pas présenté à la présidentielle, le PS a admis des candidats n’ayant pas respecté la démocratie interne du PS et a ainsi facilité la victoire de Benoît Hamon grâce aux voix d’extrême gauche. S’en suivit la double décision courageuse de Manuel Valls : ne pas respecter le résultat de la soi-disant primaire socialiste (dire qu’un certain nombre de journalistes l’ont traité de traitre sans faire de même pour Hamon ou pour Macron) et appeler à voter pour Emanuel Macron. En tant que social-démocrate, je ne pouvais faire que comme lui et voter pour la première fois de ma vie contre un socialiste…
Et certains s’étonnent que la gauche de 2022 n’arrive pas à décoller ! Comment un social-démocrate pourrait-il voter pour la NUPES, une alliance électoraliste contraire à ses valeurs car irresponsable économiquement, anti-européenne…
La deuxième gauche est-elle morte ? Je ne le pense pas et espère qu’elle n’est qu’endormie ; actuellement, elle n’a plus de leader capable de porter ses idées. Emanuel Macron n’est plus de gauche ni même centriste, il est de plus en plus à droite mais comment ne pas voter pour lui si je veux être respectueux de mes engagements (je suis personnellement social-démocrate depuis plus de 50 ans) et de l’intérêt de la France et des Français.
En 2027, Macron ne pourra pas se représenter ; on verra alors si un leader social-démocrate pourra commencer à émerger pour préparer l’avenir, en espérant que la droite l’emportera, et non pas l’extrême droite…
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