Cela fait bientôt
un an que la Russie a attaqué l’Ukraine ; je devrais dire en fait ‘a
réattaqué’ car la guerre a commencé au moins le 28 février 2014 lors de
l’invasion de la Crimée. Invasion je le rappelle condamnée par les Occidentaux
et par l’ONU lors du vote du 27 mars 2014. L’Union européenne a d’ailleurs
mis en place des sanctions contre des personnalités russes dès le 17 mars 2014.
Mais revenons en 2023,
après un an de guerre. Lors de la conférence sur la sécurité de Munich, le
président Macron a demandé aux alliés européens d’intensifier le soutien à
l’Ukraine, estimant que ‘l’heure n’est pas au dialogue avec la Russie’.
Malheureusement, Macron a encore brouillé son message en disant, lors de divers
interviews (Journal du Dimanche, Figaro, France-Inter), ‘vouloir la défaite
de la Russie mais sans l’écraser’ ; on peut être d’accord ou pas avec
cette opinion mais reconnaissons que ce ‘double langage’, ce ‘en même temps’
est une constante chez lui et n’est donc pas un hasard ou un lapsus ; cela
évoque encore le ‘il ne faut pas humilier la Russie’ de mai 2022. Et Macron
a ajouté ‘Je suis convaincu qu’à la fin, ça ne
se conclura pas militairement’, ce qui est une évidence que beaucoup oublient : il faudra bien
discuter à la fin, quelle que soit la situation militaire, et ce sera
fatalement avec le gouvernement russe et donc avec Poutine, sauf surprise de dernière
minute.
Je ne suis bien sûr pas dans la tête d’Emmanuel Macron mais je voudrais
préciser ce que je comprends du discours présidentiel, ce que je pense de fait,
et quelles sont les conséquences militaires de ces souhaits.
Nous souhaitons la défaite de la Russie : il faut donc pour cela
aider l’Ukraine le plus rapidement possible, ne serait-ce que pour diminuer
le poids de la multitude des nouveaux mobilisés russes ; compenser le
nombre par la qualité des armements. Il faut donc d’urgence fournir les chars
légers français AMX-10 RC (ce serait sur le point d’être fait selon le ministre
Lecornu), les chars d’origine allemande Léopard (cela tarde malgré les feux
verts américains et allemands). Il faudra aussi fournir des avions et tout
d’abord les MiG d’origine soviétique que possèdent les anciens pays de l’Est.
Quant à la France, la livraison future de Mirages 2000 devrait nous inciter à
donner dès maintenant une formation adéquate à des pilotes ukrainiens pour une
livraison fin 2023 ou début 2024.
(Image diffusée par France 24)
Vouloir la défaite de la Russie sans l’écraser, cette formulation
‘macronienne’ est plus ambiguë et nécessite une discussion. Il n’est
évidemment pas question que l’Ukraine envahisse la Russie et conquiert de
nouveaux territoires. Récupérer l’ensemble des territoires actuellement occupés
par la Russie, que ce soit le Donbass ou la Crimée sera suffisamment difficile.
Que l’on interdise aux Ukrainiens de bombarder des objectifs civils en Russie
est une mesure de bon sens (ils ne l’ont d’ailleurs jamais tenté) mais s’interdire
de frapper des objectifs militaires me semble une erreur évidente : en
territoire russe certes mais tout près de la frontière du Donbass se trouvent
des lignes de chemin de fer, des dépôts de carburants, d’armes qui permettent
aux Russes d’attaquer les Ukrainiens (militaires et civils). Si la portée des
armes fournies aux Ukrainiens permettait de faire des frappes sur ces cibles
potentielles, ce serait faciliter la victoire ukrainienne et la défaite des
Russes, et diminuer d’autant le nombre de morts, qu’ils soient ukrainiens ou
russes.
Si nous ne voulons pas poursuivre la guerre durant de nombreuses
années, il faut absolument permettre une victoire des Ukrainiens fin 2023 ou
début 2024. Et pour cela donner des armes, donner des armes, donner des armes… Le
faire le plus rapidement possible est un préambule indispensable afin de faire
respecter le droit international en Europe, mais aussi dans le monde. A ce
propos d’ailleurs, il serait bon de déclarer ‘terroristes’ toutes les milices
de type Wagner et empêcher par une action internationale leur pénétration sur
le territoire africain.
Redisons-le bien, finir la guerre sans repousser la Russie dans ses frontières
des années 2000, ce serait reconnaitre la justesse de la méthode Poutine, la
force toujours la force… Revenir ne serait-ce qu’aux frontières de 2021, en
cédant la Crimée à la Russie, serait reconnaitre que la force prime le droit.
Ce ne serait sans doute pas la première fois mais ce serait une fois de trop et
cela ouvrirait la voie à un nouvel ordre mondial, basé sur la force et non sur
le droit, ou plutôt un nouveau désordre mondial, à une instabilité permanente
où les démocraties seraient écrasées par les dictatures. Réfléchissons bien,
ne pas aider l’Ukraine, c’est un tel avenir que nous préparerons alors à nos
enfants.


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